samedi 24 septembre 2011

Groenland.5

J'ai oublié deux choses la dernière fois: Premièrement, j'ai loupé une baleine qui est venue respirer un coup près du bateau et deuxièmement, c'est que j'ai vu enfin, pour de vrai, du bleu marine. J'ai toujours trouvé cette couleur en tube totalement ridicule car je n'avais jamais vu de vrai bleu marine dans la mer. Là, je l'ai vu, profond, vivant, attirant à ce point que tu as envie de plonger dedans.

Après l'attente des premières glaces vient celle de la côte. Et la voici, enfin. Nous sommes au large du Cap Brewster. En face de ce cap, il y a le village de Scoresbysund dont je vous reparlerai plus tard.


J'essaye de dessiner cette côte fantomatique prise entre deux lignes épaisses de brouillard. Ça me rappelle "Skull Island", dans le premier King Kong. Richard, lui, ça lui rappelle le Mordor du "Seigneur des Anneaux". Normal, pour un anglais.






Pendant cette journée (le 05/08), j'apprends que Jørn ne pourra pas rester sur l'île d'Ella avec moi, la troisième semaine. Il était prévu que nous y restions tous les deux. Du coup, il se pourrait que je reste seul. Pourquoi pas, mais voici ce que Jonas, entre autre, me dit sur les conditions de vie sur l'île:
Bon, évidemment, je n'ai jamais tiré au fusil de ma vie! Il rajoute qu'il y aura peut-être des militaires danois (la fameuse "Sirius patrol") pour me tenir compagnie. Ouaip... je ne sais pas pourquoi mais j'ai tout de suite en tête des images du film "Délivrance" qui me viennent en tête. Dans une version arctique...

Les images qui viennent ensuite, illustrent un des moments les plus magiques (et pour le coup difficilement descriptible) de ce voyage.
Le moteur était arrêté. Un brouillard épais entourait le bateau. Tout le monde était sur le pont. Richard a apporté des petits verres de rhum sur un plateau ainsi que du "ribena"(sorte de sirop de fruits rouges) pour ceux qui ne boivent pas d'alcool. Jonas a fait porté un toast. L'ambiance était à la fois solennelle et déconnante. Michael voulait le silence pour filmer et Jonas faisait exprès de défaire les scratch de sa combi et envoya un bon coup de sirène. Ça riait bêtement comme des gamins à l'église.






Petite série de portraits.








Jeppe est en train de fabriquer un toaster pour le petit déjeuner. Tous les jours, Bo prépare trois pains aux céréales délicieusement bons. D'ailleurs tout ce qu'il prépare est bon. Et pourtant il peste d'avoir à faire la cuisine avec des produits en conserve pour la plupart. Il connait quelques expressions françaises pour avoir travaillé dans un restaurant à Nice. le premier mot qu'il a appris c'est "poubelle" et la première phrase c'est "Bouge ton cul". Toute la poésie de la langue française!
Le lendemain matin, la côte est là, plus proche mais drapée de brouillard alors même qu'un grand ciel bleu surplombe le navire.

Søren se tient à la proue pour prévenir d'un éventuel iceberg.



Tout à coup, le brouillard s'est levé.



Toute la journée le soleil nous a accompagné dans le fjord de Roi Oscar, direction l'île d'Ella au nord.





Pour finir une petite histoire que Jørn m'a raconté, ou "comment il s'est retrouvé écrivain par "accident":
C'était dans les années 70, au Groenland. Il avait écrit pas mal de choses mais n'avait jamais envisagé des les faire publier. Il reçut la visite d'un danois qui vendait des livres sur la côte.
Ils burent beaucoup de whisky. Le type voulait convaincre Jørn de publier ses manuscrits mais Jørn s'y refusait. Au petit matin, il avait disparu et Jørn ne s'en inquiéta pas plus que ça. Plusieurs mois plus tard, il reçut un courrier d'un éditeur lui faisant savoir qu'il serait ravi de publier son livre. Quel livre? Jørn mit du temps avant de comprendre que le type lui avait subtilisé des manuscrits pour les présenter à un éditeur danois. Il s'agissait de la fameuse trilogie "La Maison des mes pères".
Evidemment, ça ressemble à un racontar mais il doit bien y avoir 90% de vrai dans tout ça.

5 commentaires:

Gwen de Bonneval a dit…

Super ce 5ème épisode! Tu mets un peu plus JR en avant, c'est chouette. J'adore les dessins que tu as faits de lui. J'ai eu l'impression qu'il tournait le dos à la caméra et qu'il n'aimait pas vraiment ça, je me trompe? Le moment sur le bateau, dans le brouillard est impressionnant, à la limite du fantastique. On imagine un peu ce que pouvaient ressentir les vikings: entre réalisme pur et dur et croyances surnaturelles. Soupir...

Tanquerelle a dit…

Merci. Oui, je n'avais pas remarqué ça en le filmant mais c'est vrai qu'il donne l'impression de fuir la caméra. Bon, en même temps, c'est plutôt le genre à avoir son ipad avec lui. Pas anti-modernité à tout crin.
Et effectivement, c'était un pur moment de réalisme et de fantastique!

JWL a dit…

y a t'il une chance de pouvoir lire tout ça dans un futur magnifique ouvrage ? parce que put*** c'est fantastique !

Anonyme a dit…

Merci de nous faire vivre ce voyage par procuration, étant en plus un grand admirateur de Jørn Riel j'ai beaucoup ri de l'anecdote du vol de manuscrit...

C.B. a dit…

Carrément, il faudrait mettre un cahier supplémentaire dans un prochain tome des Racontars avec ce récit de voyage !